A la bonne distance, mais ensemble
(photo datant de juste avant le confinement en Sicile au Servizio Cristiano. La bonne distance est peut-être un plus d'un mètre, les masques seront préconisés, mais l'idée est bien là : faire communauté à bonne distance)
Toi, le Tout-autre
qui pourtant te fais tout proche en Jésus-Christ,
qui pénètres jusqu’au plus intime par ton Souffle Saint,
écoute-nous maintenant que nous cherchons ta présence.
Nous avons vécu une expérience collective inédite :
presque huit semaines de confinement,
huit semaines sans approcher
l’étranger que ta bible pourtant m’appelle à considérer prochain.
Huit semaines qui se prolongeront par des semaines -
des mois, des années peut-être -
de « distanciation sociale »,
où la situation sanitaire nous demande
de tenir en respect, à bonne distance
l’autre, proche ou lointain.
Tu sais, Adonaï, comment nous sommes,
nous avons tendance à ne voir le côté sombre des choses,
à accentuer le malheur.
Tu sais que nous sommes souvent insensibles
au sentiment de reconnaissance.
Quand nous ne sommes pas dans la jubilation autosuffisante
qui croit ne rien devoir à personne,
nous nous adonnons si facilement à la plainte.
Aussi, ce soir,
nous t’ouvrons notre cœur lourd…
Cœur lourd de grands-parents qui ne peuvent embrasser leurs petits-enfants,
cœur lourd de petits-enfants qui s’inquiètent pour leurs aînés,
cœur lourd des familles séparées par des frontières et des distances.
Cœur lourd des aventuriers qui ne peuvent pas voyager.
Cœur lourd des maîtres d’écoles qui peinent à appliquer un protocole impossible,
cœur lourd d’élèves qui auraient imaginé les retrouvailles autrement.
Cœur lourd des musulmans à la convivialité réduite pour les iftars du ramadan,
cœur lourd des chrétiens interdits d’eucharistie.
Aussi, nous te confions notre cœur lourd personnel
et avec lui notre tentation de faire fi de toute prudence en ce week-end ensoleillé…
Écoutons quelques paroles de sagesse :
« Oui, vous serez ensemble
jusque dans la silencieuse mémoire de Dieu.
Mais qu'il y ait des espaces dans votre communion,
Et que les vents du ciel dansent entre vous.
- Aimez-vous l'un l'autre,
mais ne faites pas de l'amour une entrave:
Qu'il soit plutôt une mer mouvante
entre les rivages de vos âmes.
- Emplissez chacun la coupe de l'autre
mais ne buvez pas dans la même coupe.
Partagez votre pain
mais ne mangez pas de la même miche.
Chantez et dansez ensemble et soyez joyeux,
mais demeurez chacun seul,
De même que les cordes d'un luth sont seules
cependant qu'elles vibrent de la même harmonie.
- Donnez vos cœurs,
mais non pas à la garde l'un de l'autre.
Car seule la main de la Vie peut contenir vos cœurs.
Et tenez-vous ensemble, mais pas trop proches non plus:
Car les piliers du temple s'érigent à distance,
Et le chêne et le cyprès ne croissent pas
dans l'ombre l'un de l'autre. »
(Khalil Gibran, Le prophète)
Adonaï,
en cette fin de shabbat
et cette entrée dans le jour de la création nouvelle,
emplis-nous de l’esprit de reconnaissance,
fais-nous découvrir la justesse
et de la communion
et de l’éloignement.
Apprends-nous la sagesse
pour être
ensemble à bonne distance !
Le sage nous le rappelle
que même dans la relation la plus fusionnelle qui soit
- le mariage, le côte-à-côte des amants -
il est bon de rester à bonne distance
de respecter l’intimité de l’autre,
de ne pas marcher sur les platebandes de son jardin secret.
N’est-ce pas ce que nous observons partout ?
La vie devient possible lorsque communion et éloignement sont réconciliés :
De la fusion au foisonnement,
l’univers qui ne cesse de s’espacer
partant du big-bang pour donner naissance à des myriades de constellations.
Les noyaux d’atomes sont environnés d’électrons,
les cellules dotées de membranes qui les individualisent
tout en leur donnant la possibilité d’interagir,
de s’associer en molécules,
de faire corps.
Dans la fusion comme dans la dévoration, la vie disparaît.
Mais dans la symbiose,
en écosystème,
la vie s’épanouit.
Ainsi ce sont bien des oxymores
– l’association de termes apparemment contradictoires –
qui traduisent la tension de la vie,
si seulement nous acceptons de les méditer
au lieu de les considérer comme absurdes :
distanciation … sociale
intimité … respectueuse
individualité ... soucieuse
liberté … responsable
amour … désintéressé
désir … qui se fait attendre
dans le va-et-vient
du règne des cieux
qui est déjà là … et pas encore accompli !
Aussi notre prière, n’est-elle pas
un monologue … connecté ?
A l’image du Christ, qui
dans le confinement de la solitude
retrouvait les confins de l’amour du Père
pour ensuite nous l’enseigner à nous,
disciples et familiers : Notre Père...
Demande de bénédiction :
Seigneur, tu lis au fond de moi ;
Ton œil me suit où que je sois,
De mon lever à mon coucher,
Dans mes projets les plus cachés ;
Ce que je dis, ce que je pense,
Seigneur, tu le connais d’avance.
Partout, Seigneur, tu me conduis
Et ta main droite me saisit.
Si je me cache dans la nuit,
Ta clarté sitôt la remplit.
Pour toi l’ombre même s’éclaire ;
L’obscurité devient lumière.
Éprouve-moi ; connais, Seigneur,
Toutes les pensées de mon cœur.
Avertis-moi quand mon sentier
Risque à nouveau de dévier ;
Conduis mes pas, Dieu de lumière,
Sur le chemin que tu éclaires.
Psaume 139, 1/4/7 selon Théodore de Bèze (1519-1605) / Roger Chapal (1912-1997)
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