Oser la fraternité - 10ème marche de la Lumière - station protestante

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  • Le 10/12/2015
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Esaü et Jacob (La Bible, Premier Testament, Genèse 25-36, particulièrement 33.1-11)

Fraternité contrariée – fraternité réconciliée

Dieu n’a-t-il pas plus d’une bénédiction ?

Hannouka15 affiche 1

 

Chant :

Hiné ma tov uma nayim shévët akhim gam yakhad (bis).

Hiné ma tov shévët akhim gam yakhad (bis).

Ah! qu’il est doux pour des frères de demeurer ensemble,

dans l’unité, la prière par l’Esprit qui rassemble.

Ah! qu’il est doux de demeurer ensemble (bis) !

 

 

Saynète d’entrée.

Esaü :

(cri rauque) Ahhhhhhhhhhhhh !

Je me vengerai. Tu ne m’échapperas pas. J’aurai ta peau, Jacob la jacaille.

Petit morveux, depuis tout petit, tu es dans mes pattes. Tu me talonnes. Tu me tannes :

  • pour un oui ou pour un non,
  • pour une friandise que tu avais chipée dans la cuisine de notre mère dont tu étais le chouchou
  • pour une misérable soupe aux lentilles

c’était toujours la même rengaine :

« En échange, tu me donnes tes droits de celui qui est né le premier ? » C’était une véritable obsession chez toi.

Imbécile, ça ne se donne pas et ça ne s’acquiert pas, le droit d’aînesse.

Premier-né : on l’est ou on ne l’est pas.

Même entre nous qui sommes jumeaux, il y en a un qui est sorti avant l’autre du ventre de sa mère.

En l’occurrence, c’est moi, tu entends ?  Moi ! Le fait que tu aies tenu mon talon en sortant à ton tour n’y change rien. Le fil de laine que la sage-femme a noué à la cheville du premier-né pour s’en souvenir s’est trouvé à mon pied à moi.

Par jeu, je t’ai dit : « D’accord je te le donne, mon droit d’aînesse. Oui, je te le jure. »

Bien entendu, je croisais les doigts derrière mon dos !

Mais aujourd’hui, tu es allé trop loin. Tu n’as pas honte de tromper notre père aveugle ? Tu m’as volé MA bénédiction, MON héritage, MES droits. Il n’y en a pas d’autres.

(cri rauque) Ahhhhhhhhhhhhh !

Je me vengerai. Tu ne m’échapperas pas. J’aurai ta peau, Jacob la jacaille.


 

station protestante, suite : Choeurs parlés, message, chant final hébreu, alsacien, français, arabe

Chœur parlé pour deux narrateurs :

A :

La Bible est consciente que la fraternité n’est pas chose facile. Les frères se combattent souvent, se jalousent, voire s’entretuent, et ce dès Caïn et Abel.

B :

Les familles des patriarches sont particulièrement touchées. Ismaël et Isaac, Jacob et Esaü, Joseph et ses frères aînés, même les sœurs Léa et Rachel… les exemples ne manquent pas pour raconter les antagonismes, les rivalités et les conflits violents que se livrent les membres les plus proches d’une même famille.

A :

Pour Esaü et Jacob, cela semble avoir commencé dès le ventre de leur mère Rébecca.

Il faut dire qu’on fait difficilement jumeaux plus distincts :

B :

ici Esaü, l’aîné, le roux poilu, brut de décoffrage, chasseur émérite, courant la campagne, le préféré du père Isaac.

A :

Là Jacob, le rusé, le casanier plutôt imberbe, squattant les jupons de sa mère et préférant l’élevage et la cuisine à la chasse.

B :

Bien que différents, les deux frères se livrent à une compétition acharnée pour la succession. Plus précieuse que l’héritage, il s’agit d’une bénédiction transmise de génération en génération. Dans l’esprit des intéressés, cela ressemblerait à une sorte de formule magique qui assure comme par enchantement la fortune, le succès et la descendance.

A :

Le problème ?

C’est qu’il n’y en a qu’une.

Apparemment, en tout cas, il n’y a toujours eu qu’une seule bénédiction divine, par génération.

Celle qu’a reçue Abraham,

qu’il a transmise à un de ces fils : Ismaël selon le Coran, Isaac selon la Bible.

Celui-ci, devenu vieux, vient de la transmettre à son tour.

B :

Catastrophe, Isaac s’est fait berner par Jacob avec les complicités de sa mère !

Mais que faire ? La bénédiction est donnée et elle ne se reprend pas.

A :

Esaü gémit et sanglote auprès de son père : « N’as-tu pas de bénédiction en réserve pour moi ? » (27.36)

Et une deuxième fois : « N’as-tu donc que cette seule bénédiction ? Moi aussi, bénis-moi ! » (27.38)

B :

Les paroles que prononce alors Isaac octroyant quelques miettes à Esaü ressemblent plus à une malédiction qu’à une bénédiction.

 

Message :

La fraternité n’est-elle pas contrariée par la croyance qu’il n’y a qu’une seule bénédiction ? Par la peur de manquer. Surprenant, cette double interrogation d’Esaü vis-à-vis de son père Isaac : n’as-tu pas de bénédiction en réserve pour moi ? Son père, lui-même et son frère Jacob semblent persuadés que non.

D’où elle vient, cette peur ? L’expérience des pâtres qu’étaient les patriarches était qu’il fallait de l’espace pour élever des troupeaux, un espace qui n’était pas extensible. Avec la COP21, nous nous rendons bien compte aussi que les ressources de la terre ne sont pas inépuisables. Le déficit de la sécurité sociale, le chômage endémique, la pénurie des minima sociaux nourrissent aussi les peurs existentielles qui poussent à se prémunir du frère, de la sœur qui risquerait de me priver. Tant que la fraternité se vit sur le mode de la compétition acharnée, elle ne pourra être que contrariée.

Pour que les frères, pour que les sœurs se réconcilient et vivent une fraternité véritable, il faut qu’ils découvrent la complémentarité de leur diversité, que la richesse des uns ne lèse pas le bonheur des autres. Quelle idée farfelue d’un dieu pingre qui ne donne que parcimonieusement, ne trouvez-vous pas ? Et si Dieu avait plus qu’une bénédiction à donner, aussi pour celle qui est différente et celui qui se singularise ?

 

A :

Du temps a passé. Beaucoup de temps, plus de deux décennies.

B :

Jacob s’était enfui, loin de la colère de son frère. Et il est tombé sur plus rusé que lui : son oncle Laban lui fait convoîter une de ses filles, s’il se met à son service pendant sept ans.

Ce délai écoulé, une surprise de taille attend l’heureux fiancé lors des épousailles : non pas Rachel sa bien-aimée l’attend cachée sous un voile, mais la sœur aînée de celle-ci, Léa.

Qu’à cela ne tienne, tu pourras aussi épouser Rachel, si tu t’engages pour sept nouvelles années, lui siffle Laban. Et pour encore sept autres années, tu te constitueras une fortune.

A :

En fin de compte, c’est fortuné, béni de multiples descendants que Jacob rentre au bercail.

Avec la peur au ventre : ne faut-il pas affronter son frère qu’il avait trahi ?

Il fait précéder sa caravane de nombreux cadeaux pour Esaü, dans l’espoir d’apaiser le courroux de celui-ci.

B :

Mais Esaü, lui aussi, a fait fortune. Lui aussi a trouvé le bonheur, une famille, des troupeaux. La peur de manquer, la croyance qu’il n’y avait qu’une bénédiction s’est révélée infondée.

A :

Les frères se retrouvent et se réconcilient. Désormais, la bénédiction ne sera plus unique mais multiple. A fin de sa vie, Jacob en prononcera une pour chacun de ses enfants, et vous savez qu’ils sont nombreux !

B :

Et si nous osions nous aussi la fraternité, en sachant que la bénédiction de notre Dieu a de la ressource ?

 

Lecture de Genèse 33.1-11 : la rencontre de Jacob et d’Esaü

 

Chant final :

Hévénou shalom alekhem. De Fridde mit Eijch àlli !

Nous vous souhaitons la paix. Salam aleikum ! Aleikum Salam.

(hébreu, alsacien, français, arabe)

200bis

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Le communiqué de presse

 

Oser la fraternité – 10ème marche de la Lumière

Hannouka15 affiche

“Face à l’obscurité, allumer des lumières. Face à l’obscurantisme, oser la fraternité.” C’est avec cette devise que se tiendra la 10ème marche interreligieuse de la Lumière à Sélestat, le mercredi 9 décembre prochain, à l’appel des responsables de communautés. Parmi eux, le curé Christian Kamenisch, Odette Sonntag et le pasteur Jürgen Grauling pour les chrétiens, Franck Levy et Michèle Gassmann de la communauté israélite et, pour la première fois, Fawzi Ménina représentant l’imam-président Sarouaou de la mosquée El-Ihssan.

Rendez-vous est donné à 18h30 à la synagogue pour l’allumage des lumières de Hannoukka (accès par le square Ehm), sous la présidence du rabbin Claude Spingarn. Chaque communauté partagera un court message spirituel de fraternité lors des stations dans les différents lieux de culte, entre les stations l’assistance se déplace munie de lumignons. Pour finir en beauté, la paroisse catholique invite à un “verre de lumière”.

Tout en respectant les convictions de chaque religion et leurs usages particuliers (se couvrir la tête à la synagogue, se déchausser à la mosquée), les responsables religieux font le pari pour la dixième fois qu’un même élan de paix et de solidarité les anime ! Un témoignage d’autant plus audacieux et important par les temps qui courent. A ce sujet, l'association musulmane Ennajah fréquentant la mosquée El-Ihssan a récemment publié sous le titre “Je suis Paris” un vibrant soutien pour les victimes des récents attentats et un appel fort au respect interreligieux et citoyen.

10ème marche de la Lumière, Sélestat, 9/12, début à 18h30 dans la synagogue


 

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