La journée d'un ouvrier de la première heure
Matthieu 20/1-16 parabole des ouvriers de la dernière heure
Prédication rimée du dimanche 12 février 2017
(Septuagésime, thème : Mérite et grâce)
Ma journée d'ouvrier de la première heure
De grâce !
Ne me parlez pas de grâce
moi je bosse et j’amasse
faire la journée de douze heures
cela ne me fait pas peur
Sur le marché, je me présente tôt
six heures du mat’, au bas mot
car tel maître qui sort tôt du pieu
des chances pour qu’il paye mieux
Des chances pour qu’il sache apprécier
le sérieux du travail effectué
Des chances même infimes
pour que le soir, il donne une prime.
Ce matin-là, je suis bien tombé
A peine me suis-je présenté
que déjà suis embauché
Une pièce d’argent, tope là, accepté !
Avec cela je peux nourrir
ma femme et mes enfants
peut-être même leur faire plaisir
en passant chez le marchand
Ah, que j’aime ces heures de l’aurore
surtout dans le vignes que j’adore
Vraiment suis bien tombé
s’annonce une belle journée
En plus, tout est organisé
les outils, le planning, le rythme et l’allure
Il est permis de plaisanter
avec les camarades d’aventure.
Plaisant, c’est bien le mot à dire
Jamais je n’aurais cru possible
qu’au travail on prendrait autant de plaisir
Toujours ce n’était qu’un devoir pénible.
Neuf heures, moment de répit
un casse-croûte est même servi
C’est pas de refus, car il va faire chaud
les prochaines heures de boulot
Tiens, le maître amène du renfort
Des ouvriers un peu lève-tard
Au fond, il n’a pas tort
La tâche abonde, elle n’est pas rare.
Midi, ah, le soleil tape dur
La pause, je l’aurais méritée pour sûr.
Mais misère ! Pour tout sandwich
je n’ai qu’une toute petite miche.
A peine la sors-je de ma besace
que le maître organise une communion
saucisses, gâteaux, tout un repas de grâce
où eau et vin coulent à profusion.
Quelle joie, les sourires et les rires fusent
ils chassent la fatigue qui use
Le partage n’est pas que de nourriture
mais d’échanges profonds et de fioritures.
Au travail ! Avec une fraîcheur nouvelle
Ce repas m’a requinqué
pas que le corps, c’est sprituel !
Il m’a entièrement réveillé !
Mais que ne vois-je ? Le maître, de plus,
a fait de nouvelles recrues.
Venez, venez, entrez dans la ronde
car – oui ! - le travail abonde !
Le repas était bon,
mais l’après-midi très long
Les bras s’épuisent
Les forces s’amenuisent
Le maître, et c’est heureux
déniche des renforts de dernière heure
On se demande qui sont ces gueux
Mais ils nous soulagent ! A la bonne heure !
A la bonne heure aussi, le soir arrive
Ça sent les retrouvailles avec la famille
Aujourd’hui, j’apporterai une grive
La fête se prolongera comme à midi.
Lorsque je pense aux miens
j’ai une pensée aux leurs
on doit gagner un rien
lorsqu’on arrive à la dernière heure
Ce soir encore, ça doit être la misère
ils doivent se sentir mauvais maris et pères
J’en aurais presque pitié
Mais enfin, faut être sérieux en son métier.
Cela se lit sur leurs visages
lorsqu’ils se présentent au receveur
Ils ne peuvent s’attendre à des mirages
avec trois, voire qu’une heure au compteur.
Pourtant leur visage s’éclaire
Ils ont l’air réjoui
Oui, c’est qu’ils sourient
Quel est donc ce mystère ?
Il paraît, c’est incroyable,
qu’eux aussi ont recueilli
le salaire d’une journée ouvrable
Y a de quoi être surpris !
Tant mieux pour eux
Tant mieux pour leurs familles
Mais vraiment quel maître généreux
qui ne fait pas d’économies
Tant mieux sans doute pour nous
car j’ai la conviction intime
oui j’ai cet espoir fou
de recevoir une belle prime
Je vais pouvoir faire des folies
boire un coup au bistrot du coin
acheter des cadeaux pour la familles
et demain ne faire rien !
Las ! Quand c’est mon tour
Une seule pièce se renferme dans ma main
Eh maître, mais pour l’amour
du ciel, expliquez-vous, car je me plains.
J’ai bossé dur
toute la journée
Le soleil a tapé sur
ma boîte à raisonner.
Qu’ai-je fait pour que tu te moques
du travail bien fait
Agissant ainsi, tu m’escroques
ton respect, j’ai mérité
Les autres n’ont quasi rien fait
et vont se pavaner devant leur belle
Si c’est ça ce qui te plaît,
invente le rev’nu universel
C’est ainsi que je m’ébruite
que je gonfle mon buste
que j’étale mes mérites
Car vraiment c’est injuste.
La grève, ça me connaît
je ne me laisse pas faire
Ma voix de loin se reconnaît
je dis ce qui ne va pas plaire
Ni Dieu ni maître
Personne n’a plus de poids
Tous, je les envoie paître
souvent avec une solide mauvaise foi
A moi d’apprendre une leçon
Loin de se démonter
le maître me répond
n’a pas peur de l’effronté.
Pour l’amour du ciel, j’agis
Voilà ce qu’il me dit
M’en veux-tu que je sois bon
La grâce est un don profond.
Une justice bien plus juste
qu’un calcul proportionnel
des mérites ou d’actions injustes
de bonté ou de fiel
N’as-tu pas retiré tes billes
ne peux-tu pas nourrir ta famille
De plus, tu as passé une riche journée
as mangé, chanté et communié
Veux-tu vraiment tout gâcher
et rentrer chez toi tout fâché ?
Va et réjouis-toi avec les tiens
et demain, à la première heure, reviens.
Vis la vie à pleines dents
Expose ta peau à tous les vents
fais ce qui t’es donné faire
c’est ça la vie qui va te plaire
C’est elle qui va faire sens
te faire grandir d’expérience
va faire de toi un responsable
bon, droit et charitable
De grâce, réfléchis et médite en toi
Qu’est-ce qui dans la vie a vraiment du poids ?
Que tu thésaurises, que tu amasses ?
Ou de vivre, jour pour jour, de la grâce ?
Que cette miséricorde, cette grâce
qui mystérieusement tout dépasse
la sagesse de tous sages
te garde d’âge en âge.
Qu’elle te chante sa chanson
de bonté et de pardon
Qu’à la perfection elle t’emmène
aujourd’hui et demain. Amen.
(Une fois par an, autour de carnaval, Jürgen Grauling propose un culte avec une prédication en rimes)
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