Amélie appose son apogriffe

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  • Le 22/10/2019
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Les évangiles apocryphes s'opposent aux quatre entrés dans le canon du Nouveau Testament. Souvent, ils sont d'un intérêt limité, apportant un contenu plus ou moins légendaire autour de la vie supposée de Jésus. Parfois, il arrive qu'ils rapportent des paroles attribuées à Jésus, assez proches de celles que nous connaissons par Matthieu, Marc, Luc et Jean, comme l'évangile de Thomas.

Mais il est des évangiles canoniques comme des religions dont on dit parfois que ce sont des sectes qui ont réussi. Les quatre évangiles du Nouveau Testament ont été choisis, parce qu'on les considérait plus anciens, plus authentiques ou plus orthodoxes que les autres, au moment de former le canon. Seule garantie pour un choix judicieux : l'assistance supposée du Saint-Esprit.

Avec "Soif", Amélie Nothomb nous livre son apocryphe personnel. Elle aussi contredit parfois la version canonique officielle.

Si vous exigez une conformité biblique, passez votre chemin, le livre vous révulsera. Un Jésus amoureux de Madeleine, un Judas en ami impossible, une mission messianique ratée vous paraitront par trop hétérodoxes.

Mais si vous osez l'aventure d'un fils de Dieu incarnée jusqu'à "l'écorce" de sa peau, extrêmement sensible et sensuel, déchiré de doutes mais assoifé de sens, courez le lire. Nothomb nous fait connaître un Jésus profondément humain et parfaitement contemporain.

L'absurde souffrance, la haine de soi, un pardon obtenu de haute lutte, la vie éternelle comme une danse joyeuse et une soif salutaire. Cette soif qui, contrairement à ce que dit l'évangile de Jean, ne s'étanche pas et c'est en cela qu'elle porte le salut.

"J'ai soif!", dernier mot sur la croix. "J'ai foi!" (sans complément, "intransitif") comme synonyme d'une dense présence (danse présence ?) qui perdure.

Quelle soif, quelles fois ont donc les auteurs belges à vouloir imaginer les dernières heures du Christ ?

Il y a quelques années, Eric-Emmanuel Schmitt (belge par naturalisation) a mis son "monologue d'un condamné à mort" dans la bouche du Christ (Evangile selon Pilate). Maintenant, c'est à Amélie Nothomb d'apposer son apocryphe intime et perso.

L'une comme l'autre me bouleversent et me donnent foi.

 

Jürgen Grauling

 

Amélie Nothomb, Soif, Albin Michel 2019

 

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Soif; foi; Nothomb; Jésus; aimer

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